lamdan[at]laposte.net

55 LA TIRADE DES CAKES


d'aprés "LA TIRADE DES NEZ" d'Edmond ROSTAND


La scène se passe en salle des profs, un lundi Aprés le repas, pour le café, CHRISTINE qui le matin a fait club cuisine , a apporté un cake, en un mot, chacun s'en paye une tranche, mais il en reste . . .
ANDRE Personne ne va donc en reprendre, ? JEAN-PIERRE Personne ? Attendez, je vais lui lancer un de ces traits ! . . .
(il se tourne vers Christine qui l'observe, et se campant devant elle.) Chère collègue . . .votre cake . . . a un goût
. CHRISTINE (froidement comme d'habitude) Je sais
LES COPAINS riant (grassement) Ah !
CHRISTINE (encore plus froidement) C'est tout ?
LES COPAINS (interloqués) Mais ...
CHRISTINE Ah non c'est un peu court jeune homme ! On pouvait dire, messieurs, bien des choses en somme. En variant le ton, par exemple, tenez : -Agressif : " Moi Christine, si j'avais un tel cake, Il faudrait sur le champ que je le partageasse ! " -Amical : " Mais quand vous le trempez dans une petite tasse, Faites bien attention, de ne salir la nappe ! " -Descriptif : " Votre cake ? c'est une tarte ! un gâteau ! Que dis-je, un gâteau ? C'est le dessert d'Hercule ! " -Curieux : " Pourquoi laisser cette oblongue capsule ? Coupez-la s'il vous plait en tout petits morceaux ! " -Gracieux : " Aimez-vous à ce point les oiseaux Que maternellement , vous vous preoccupâtes De leur donner aussi de cette bonne pâte " -Truculent : " Ca Christine, lorsque vous cuisinez Les odeurs de vos plats, arrivent-elles au nez Sans qu'un voisin ne crie, enfin on va dîner ! " -Prévenant : " Prenez garde, par son poids entrainé Qu'il tombe sur vos pieds, plutôt que sur le sol ! " -Tendre : " Faites-lui faire un petit parasol De peur que son aspect au soleil ne se fane ! " -Pédant : " Le gâteau seul, messieurs, qu' Aristophane Appelle espèce-de-gros-kougloff ! Doit avoir sous la croûte, tant de fruits, et tant d'oeuf ! " -Cavalier : " Quoi l'amie, ce plat est à la mode ? Pour calmer un p'tit creux, c'est vraiment trés commode ! " -Emphatique : " Aucun four, ne peut, plat magistral, Te cuire tout entier, excepté l'infernal ! " -Dramatique : " Il fait la planche, quand il baigne ! " -Admiratif : " Pour un pâtissier, quelle enseigne ! " -Lyrique : " Est-ce une couque, fites-vous un pâton ? " -Naïf : " Ce monument, quand le découpe-t'on ? " -Militaire : " Coupez comme pour un pain de mie ! " -Campagnard : " Hé, hardé, c'est-y un cake ? nanain ! C'est queuque pavé géant, ou ben un gros parpaing ! " -Pratique : " Voulez-vous le mettre en loterie ? Assurément, Christine, ce sera le gros lot ! " Enfin, parodiant LENOTRE, en un sanglot : " Voilâ donc ce dessert, qui de notre repas Rompt la monotonie, il en rougit, le traître ! " - Voilà ce qu'à peu près, mes chers, vous m'auriez dit Avecque plus de lettres et bien moins d'appétit, Car d'appétit, vous en avez beaucoup plus qu'une tonne Et de lettres, vous n'avez que les quatre qui forment le mot FAIM Eussiez-vous eu d'ailleurs la goinfrerie qu'il faut Pour pouvoir là devant ma bonne pâtisserie Me lancer toutes ces folles plaisanteries, Que vous n'en eussiez placé le quart du commencement d'une, Car si je vous les sers moi-même avec assez de verve, Je ne permettrai pas qu'un autre se resserve. ESPERONS QUE CETTE SCENE, NE RESTERA PAS DE LA POETIQUE-FICTION

Page de téléchargement

lamdan[at]laposte.net